Le projet scientifique
Il existe un consensus scientifique croissant sur la nécessité de réduire la consommation de produits d'origine animale. Springmann et al. (2016) estiment que, si rien n'est fait, la production alimentaire pourrait représenter 52% des émissions de gaz à effet de serre d'ici 2050, contre 15% si l'humanité adopte une alimentation végétale. Tilman et Clark (2014) concluent que l’arrêt de la consommation de viande réduirait le risque de diabète de type 2 de 41%, de cancer de 10% et de maladies coronariennes de 20%.
On observe également une véritable dynamique sociale visant à réduire la consommation de viande et à s'engager pour la condition animale. Un rapport du CREDOC estime que la consommation de viande par habitant a diminué de 12% entre 2007 et 2016. L'enquête Eurobaromètre européen de 2016 révélait que 88% des Français souhaitent une meilleure protection pour les animaux d'élevage. Cette forte préoccupation pour la condition animale est entrée dans le jeu politique avec la création d'un parti animaliste en 2016, qui a réussi à franchir le seuil minimum pour obtenir des financements publics dans 86 circonscriptions lors des élections législatives de 2017.
L'économie n’a montré jusqu’à récemment que peu d’intérêt pour ces questions. Ce projet vise à développer une approche économique de cette consommation. Les travaux en psychologie ont principalement développé une analyse comportementale de la consommation de viande basée sur la théorie de la dissonance cognitive, prenant en compte le fait que de nombreuses personnes se soucient du bien-être des animaux mais continuent de consommer des produits qui causent de graves dommages aux animaux (paradoxe de la viande). Ils ont montré que la dissonance cognitive entre les préférences en matière de bien-être animal et les préférences alimentaires incitait les individus s'auto-persuader du bien-fondé de leur consommation.
Les économistes ont également consacré quelques travaux, en nombre beaucoup plus modeste, à la différence entre les choix de consommation et les préférences sociales en matière de consommation de viande. Lusk et Nordwood illustrent ceci avec la proposition 2 adoptée par référendum en Californie en 2008: alors que la plupart des œufs vendus dans cet État provenaient de poules élevées en cage, une large majorité de citoyens a voté en faveur de l'obligation d'élevage des poules en plein air. Les auteurs expliquent que la question de la condition animale est similaire à un bien public: l’impact marginal de consommer un œuf d'une poule élevée en liberté sur la condition animale est très limité, mais il serait très bénéfique d’améliorer collectivement le bien-être des animaux. Cette approche de peut être généralisée aux préoccupations environnementales et sanitaires.
Ce projet de recherche contient trois séries de travaux mobilisant principalement des méthodes expérimentales. La première série étudie la consommation de produits d'origine animale comme un choix privé. L'étude 1.1 développe des méthodes économiques pour dissocier la dissonance cognitive de l'ignorance naïve. L’étude 1.2 examine l’incidence de la dissonance cognitive sur l’apprentissage social pour les alimentations carnées. L’étude 1.3 propose une approche multidisciplinaire des épiphanies végé (la prise de conscience de la nécessité d’adopter une alimentation végétale). La deuxième série analyse les alimentations carnées comme un choix collectif. L'étude 2.1 examine l'efficacité des discours des ONG pour convaincre d'adopter des alimentations végétales. L’étude 2.2 analyse l’impact de la création d’un parti animaliste en France sur la concurrence politique. La troisième séries examine l’écart entre les choix privés et collectifs. L’étude 3.1 documente l’écart 'consommateur-électeur' dans l’Union européenne en combinant des données d’enquête, de consommation et expérimentales. L'étude 3.2 explore l'efficacité des outils juridiques permettant de réguler les externalités des produits d'origine animale.
Informations complémentaires
Acronyme : EPDAW pour "Economics of Plant-Based Diets and Animal Welfare"
Appel à projets générique : 2019
Durée : 48 mois
Instrument de financement : ANR Jeune Chercheur Jeune Chercheuse (JCJC)
Comité : CE21 - Alimentation
Labels : AVCA (http://avca.fr)